Annuler le compromis de vente : le droit de rétractation de l'acquéreur
Vous venez de signer un compromis de vente pour un bien immobilier. C’est alors que votre cousin, agent immobilier de père en fils, vous appelle pour vous informer que l’appartement que vous convoitiez depuis 2 ans est enfin disponible à la vente. Que faire ? Renoncer à cette affaire en or et honorer le compromis de vente ou trouver un moyen d’annuler le compromis de vente pour acheter l’appartement de vos rêves ?
Le problème étant posé, disposez-vous de la marche de manoeuvre nécessaire pour annuler le compromis de vente ?
C’est ce que nous allons voir ensemble en étudiant une à une les options disponibles pour annuler votre compromis de vente sans payer d'indemnités au vendeur. Mais avant tout, un peu de théorie !
Qu’est-ce qu’un compromis de vente ?
Le compromis de vente est un avant-contrat réalisé avant la vente définitive. Il permet de sécuriser la phase d’avant vente devant notaire en engageant notamment les parties à faire la vente dans les conditions fixées dans le compromis.
En d’autres termes, contrairement à la promesse de vente qui n’engage qu’une partie (le vendeur), le compromis de vente engage les deux parties : l'acheteur et le vendeur. Mais dans ce cas, à quoi bon signer un compromis de vente si les deux parties sont d’accord sur la chose et sur le prix ?
La différence entre le compromis de vente et l’acte de vente authentique
En acheteur averti, vous savez certainement qu’une vente immobilière se fait par acte authentique. Là où un contrat de vente classique (achat d’un objet quelconque) se fait de manière consensuelle, sans formalisme particulier, un contrat de vente immobilier implique l’intervention d’un notaire.
Or, l’intervention d’un notaire ne peut se faire immédiatement quand bien même l'acquéreur et le vendeur sont d’accord sur la chose (l’appartement) et sur le prix. De même, certains documents essentiels tels que les différents diagnostics (important pour la purge des vices cachés) peuvent manquer pour le moment.
C’est alors que le compromis de vente prend tout son sens : il permet de sécuriser la future vente en offrant des garanties à l’acheteur et au vendeur dans l’attente de l’acte notarié et, dans la plupart des cas, de l’obtention du prêt immobilier par l’acquéreur.
Parmi les garanties consenties, la possibilité pour l'acquéreur de rompre le compromis de vente dans certaines circonstances.
Peut-on annuler un compromis de vente ?
“Je crois que la question, elle est vite répondue” comme dirait le grand sage (celui qui ne prend pas le bus parce que ça fait “pitié”).
Pourtant, le compromis de vente est un contrat qui, dès lors qu’il ne prévoit pas de possibilité d’annulation, ne peut être rompu unilatéralement si aucune faute ne peut être imputée au cocontractant.
Ceci étant, un compromis de vente prévoit contractuellement et légalement différentes possibilités d'annulation :
- la rupture du compromis de vente suite à l’exercice du droit de rétractation prévu par la loi “Macron” du 8 août 2015 ;
- l’absence de réalisation de la condition suspensive de prêt ;
- la carence (ou une faute contractuelle d’une importance suffisante pour justifier la résolution du compromis) du vendeur.
Ainsi, votre faculté d’annulation du compromis de vente va dépendre essentiellement de votre état d’avancement dans les étapes de votre achat immobilier et du comportement du vendeur. À défaut, vous vous exposez au paiement d’indemnités, le plus souvent prévu dans le compromis de vente afin d’indemniser le vendeur pour avoir réservé et immobilisé son bien au profit de l'acquéreur (nous y reviendrons).
Annuler le compromis de vente grâce au délai de rétractation
Le délai de rétractation est certainement la manière la plus efficace pour rompre unilatéralement un compromis de vente. En effet, il s’agit d’un droit reconnu exclusivement l'acquéreur lui permettant pendant 10 jours de le rompre unilatéralement sans le paiement de la moindre indemnité.
Ainsi, dans le cas où vous auriez payé un acompte. Ce dernier devra être restitué dans son entièreté.
Quand débute le délai de rétractation du compromis de vente ?
Avoir un délai de rétractation c’est bien, mais encore faut-il savoir quand il commence !
Ainsi, il convient de distinguer deux cas de figure :
- le compromis de vente est envoyé par courrier à l'acquéreur. Dans ce cas, le délai de rétractation commence le lendemain de la première présentation de la lettre notifiant le compromis de vente à l’acquéreur.
- Le compromis de vente est signé en présence de l’acheteur et du vendeur (chez l’agent immobilier ou devant notaire par exemple). Dans ce cas, le délai de rétraction débute le lendemain.
Bon à savoir : si le dernier jour du délai de rétractation est un samedi, un dimanche ou un jour férié, le délai de rétractation est prolongé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Comment user de son droit de rétraction immobilier ?
Si avant l’expiration des 10 jours de rétractation, vous décidez de vous rétracter, il faudra suivre une procédure particulière pour notifier au vendeur votre volonté et, surtout, disposer d’une preuve en cas de litige.
Pour ce faire, il vous suffit d’envoyer une lettre recommandée avec avis de réception en énonçant clairement votre volonté de vous rétracter. L’avis de réception vous permettra de justifier que le vendeur a bien été notifié de votre rétractation.
Si vous avez dépassé le délai légal de rétractation et que le compromis de vente ne prévoit pas une prorogation de ce délai, il faudra trouver une autre solution pour annuler le compromis de vente.
Annuler le compromis de vente avec l’application des clauses suspensives
À ces fins, il est possible d’annuler le compromis de vente via la condition suspensive de prêt. En effet, le compromis de vente est dans la grande majorité des cas assorti d’une condition suspensive de prêt de sorte que la vente devant notaire ne peut aboutir qu’à la condition que l'acquéreur obtienne son financement.
Qu’est-ce que la condition suspensive de prêt ?
La condition suspensive est une clause du compromis de vente visant à sécuriser l’acquéreur dans le cas où il n’obtiendrait pas son prêt immobilier.
Dans les étapes d’un achat immobilier, le financement intervient dans la grande majorité des cas une fois que l’acheteur a signé un compromis de vente.
Le plus souvent, la condition suspensive est réputée non accomplie si :
- l’acheteur a essuyé deux refus de deux banques différentes ;
- le taux d’intérêt d’emprunt de l’offre de prêt est supérieur à ceux mentionnés dans le compromis de vente de sorte que l’acheteur n’est pas obligé d’accepter des conditions de financement inacceptables.
Ainsi, dans le cas où vous n'obtiendrez pas votre prêt immobilier dans le temps imparti par la clause suspensive (minimum 30 jours), le compromis de vente est annulé.
Son annulation entraîne la restitution du séquestre (acompte) sans pour autant aboutir au paiement d'indemnités au vendeur.
Peut-on utiliser la condition suspensive de prêt pour annuler le compromis de vente ?
Avez vous déjà entendu parler de conditions potestatives ? Sauf si vous êtes juriste, il y a peu de chances ! En droit des contrats, les conditions suspensives qui dépendent de la seule volonté d’un seul contractant sont nulles c’est-à-dire qu’elles ne sont pas applicables.
En l'occurrence, il pourrait être tentant de raisonner de la manière suivante : si je ne fais aucune démarche auprès des banques, je n’aurais pas de prêt donc le compromis de vente sera annulé.
Si la condition suspensive est valable dans une telle situation, on dit qu’elle est potestative donc nulle.
C’est pourquoi l’acheteur doit toujours démontrer avoir essuyé au moins deux refus de deux banques différentes pour annuler le compromis de vente.
Il est donc impossible d’annuler volontairement un compromis de vente avec la condition suspensive. Ainsi, l’annulation du compromis en cas de carence de l’acheteur dans sa recherche de financement entraînera le paiement d'indemnité au vendeur.
Annuler le compromis de vente pour cause de carence
La carence est une situation de fait dans laquelle se trouve une personne si elle n'exécute pas ce à quoi la loi ou un contrat l’obligeait. Dans le cadre d’un compromis de vente, il s’agit d’une inexécution contractuelle où le vendeur s’abstient par exemple de se présenter devant le notaire pour conclure la vente.
Dans ce cas, l’acheteur peut demander l’annulation du compromis de vente et le paiement de dommage et intérêt. Pour ce faire, il devra se présenter devant le notaire qui dressera un procès-verbal constatant la carence du vendeur.
Vous l'aurez compris, ce cas d’annulation du compromis de vente est très circonstanciel et dépend du comportement du vendeur. Il est donc difficile de compter sur la carence pour vous désengager du compromis de manière unilatérale et purement opportuniste !
Annulation du compromis de vente : attention aux indemnités d’immobilisation
Dans la plupart des cas que nous avons vus, l’annulation du compromis se fait sans payer la moindre indemnité au vendeur. C’est d’ailleurs l’objectif puisque vous pourrez toujours vous désengager d’un compromis de vente à condition de payer le montant de la clause pénale ou de dédit au vendeur.
Ces clauses sont toujours prévues dans le compromis de vente afin de dissuader l’acheteur de revenir sur son engagement et de prendre en considération le préjudice d’immobilisation du bien immobilier par l’acheteur. En effet, une vente immobilière financée par emprunt bancaire peut prendre un certain temps (3 mois en moyenne). Pendant toute cette durée, le vendeur doit entretenir son bien sans la possibilité de trouver un autre acheteur. Si au bout des 3 mois, la vente n’aboutit pas, autant dire que le vendeur sera plutôt désappointé.
C’est pourquoi, à des fins d'indemnisation, l’acheteur s'engage en signant le compromis de vente à verser 5 à 10% du prix de vente en cas d’annulation dans les cas non prévus par le contrat (c’est à dire autre que rétractation, carence et condition suspensive non réalisée).
Désormais, vous savez tout sur l’annulation du compromis de vente ! Et au pire, si d’ici là vous oubliez, appelez-nous ! On se fera un plaisir de vous accompagner, de l’audit de votre bien immobilier jusqu’à votre accession effective à la propriété immobilière !