Faut-il créer une SARL pour investir dans l'immobilier ?
Investir dans l’immobilier par l’intermédiaire d’une société est une pratique courante. Transmettre votre héritage par anticipation, investir à plusieurs pour disposer d’un capital plus important, il y a de nombreuses bonnes raisons de créer une société pour investir dans l’immobilier.
Dans la grande majorité des cas, les investisseurs s’orientent vers la SCI (société civile immobilière) en ce qu’elle est facile à gérer et à constituer. Qu’en est-il de la SARL immobilière ? Est-ce une bonne société pour réaliser un investissement immobilier ?
Qu’est-ce qu’une SARL immobilière ?
La SARL immobilier est une société commerciale constituée dans le but d'acquérir, de gérer et d’exploiter un ou plusieurs biens immobiliers. Jusqu'ici, rien de bien nouveau par rapport à la SCI mise à part que la société est commerciale impliquant un certain nombre de caractéristiques légales telles que la responsabilité limitée des associées, des obligations administratives et déclaratives, le régime fiscal de l’impôt sur les sociétés...
Nous allons passer au crible toutes ces particularités pour qu’à la fin vous puissiez savoir si la SARL immobilière est bien adaptée à votre projet !
SARL de famille ou SARL immobilière ?
La SARL immobilière peut prendre deux formes en fonction de la qualité des associés :
- la SARL immobilière classique, constituée à partir d’associés n’entretenant aucun lien familial
- la SARL de famille où les associés sont tous issus de la même famille jusqu’au 4e degré
La SARL de famille est particulièrement intéressante notamment pour investir dans l’immobilier à plusieurs et faire bénéficier aux associés du statut LMNP (loueur en meublé non professionnel). Si cela vous intéresse, nous vous recommandons cet article sur la SARL de famille en LMNP.
Ce sujet ayant déjà été traité, intéressons-nous à la SARL immobilière créée avec des amis ou des co-investisseurs, hors du cadre familial.
Fonctionnement et caractéristiques de la SARL immobilière
Comme dans toutes les sociétés immobilières, lorsque vous apportez de l’argent, vous n’êtes pas directement propriétaire du bien immobilier, mais d’une partie du capital de la société.
En tant que fondateur et associé de la SARL immobilière, vous disposez donc d’un nombre de parts sociales en fonction de votre apport dans le capital. Ces parts sociales de SARL vous confèrent deux droits majeurs :
- le droit de percevoir les dividendes (c’est à dire les bénéfices réalisés par la société au moyen des revenus locatifs et des plus values immobilières)
- le droit de voter les décisions relevant de l’assemblée générale (changer les statuts, voter la distribution de dividendes, nommer ou révoquer le gérant…)
A noter que votre droit de regard en tant qu’associé de la SARL immobilière est moins important qu’en SCI. En effet, la SCI étant une société civile sans responsabilité limitée, cette dernière ne pourra pas contracter de nouveaux prêts immobiliers sans demander l’accord des associés. En SARL, l’accord des associés pour s’endetter n’est pas obligatoire.
Ceci nous amène à une notion centrale : la responsabilité limitée des associés d’une SARL immobilière.
Responsabilité limitée des associés de SARL : avantage ou inconvénient ?
Pour faire simple, la responsabilité limitée des associés est un concept juridique permettant aux associés de la SARL de ne pas perdre plus que leur investissement respectif. Si vous mettez 100 euros dans la SARL immobilière, vous ne pourrez pas perdre plus que 100 euros : la SARL immobilière fait écran avec votre patrimoine personnel.
Super me direz vous ! Vous pouvez emprunter sans vous soucier du remboursement !
En réalité non ! Si vous souhaitez faire emprunter la SARL immobilière, sachez que la banque n’est pas née de la dernière pluie et est au courant du mécanisme de responsabilité limitée. Elle va donc vérifier si la société dispose d’un actif suffisant pour se rembourser en cas de défaut de remboursement. Autrement dit, il faudra que l’apport en capital (à l’instar d’un apport personnel) soit amplement suffisant pour la rassurer en cas de liquidation judiciaire.
A défaut, elle demandera aux associés de se porter caution (s’il dispose d’un patrimoine suffisant) ce qui revient in fine à annihiler l’effet de la responsabilité limitée de la SARL immobilière.
Ainsi, ne comptez pas sur la création d’une SARL immobilière pour échapper à vos responsabilités !
Les coûts de fonctionnement d’une SARL immobilière
La SARL est une société commerciale normalement constituée pour créer et exploiter une entreprise. Qui dit entreprise sous la forme d’une société commerciale dit obligations administratives et fiscales.
Contrairement à la SCI l’IR, la SARL immobilière est tenu par un certain nombre d’obligations coûteuses et contraignantes :
- la tenue d’une comptabilité d’engagement
- l’établissement annuel d’une liasse fiscale pour déclarer et liquider l’impôt sur les sociétés
- effectuer un inventaire annuel de la valeur des éléments de l'actif et passif
- le dépôt du compte au greffe du tribunal de commerce
Dans ces conditions, l’exploitation de biens immobiliers sous la forme d’une SARL immobilière génère un coût supplémentaire non négligeable. Vous serez obligé de faire appel à un expert comptable (environ 1000 euros à l’année), sans compter les différents frais d’enregistrement.
Régime de la double imposition : la fiscalité applicable aux SARL immobilières
Pour vérifier si la SARL immobilière est faite pour vous, il convient de faire le point sur la fiscalité. Contrairement à la SCI et à la SARL de famille, en SARL immobilière vous n’aurez pas le choix du régime fiscal. Une SARL immobilière relève toujours du régime fiscal de l’impôt sur les sociétés.
Ce régime fiscal a un impact majeur sur la rentabilité nette de votre investissement locatif en raison du double régime d’imposition :
- les bénéfices (revenus locatifs + plus values - charges) sont dans un premier temps imposable dans la SARL de famille à hauteur de 15 % pour la tranche comprise entre 0 et 38 120 euros, puis 28 % pour la tranche supérieur
- les dividendes perçus (ce que vous gagnez) sont imposables à hauteur de 30 % (flat tax)
Ainsi, le taux global d’imposition sur vos bénéfices locatifs avoisinent les 40 % environ. Autrement dit, pour que la double imposition soit rentable, il faudra faire partie des personnes ayant un revenu imposable supérieur à 73 370 euros.
A vrai dire, il s’agit ici d’une estimation et la facture fiscale dépend de plusieurs facteurs. Par exemple, le fait d’être en SARL immobilière permet d’amortir le bâti de l’immeuble (chose impossible en SCI à l’IR) venant réduire artificiellement le bénéfice imposable. Si vous vous débrouillez bien, il est même possible de dégager un déficit (qui pourra d’ailleurs être reporté sur les années suivantes).
Ceci étant, à partir du moment où vous amortissez votre bien, votre plus value sera plus importante puisque les plus values professionnelles tiennent compte de la valeur nette comptable du bien immobilier (c’est à dire la valeur du bien déduction faite des amortissements) et non de la valeur d’acquisition. Autrement dit, avec des amortissements en SARL immobilière, vous ne faites que reporter la case impôt jusqu’à la revente effective du bien.
En bref, si vous souhaitez vous orienter vers une SARL immobilière pour son régime fiscal, préférez plutôt la SCI à l’IS, moins contraignante en termes de gestion et surtout, comme nous le verrons, vous n’aurez pas à payer de cotisations sociales sur les dividendes en cas de gérance majoritaire.
Le cas particulier de la gérance majoritaire en SARL immobilière
En SARL, les gérants de la société peuvent être considérés comme travailleurs non salariés (TNS) ou assimilés salariés. Cela dépend de la répartition du capital social :
- Si un ou plusieurs gérants détiennent plus de 50 % du capital, ces derniers sont considérés comme TNS. On parle alors de gérance majoritaire.
- À l'inverse, ils sont assimilés salariés.
Oui et alors, me direz-vous !
Figurez-vous que la gérance majoritaire rend exigible les cotisations sociales sur les dividendes perçus (soit environ 40 % !). Autant dire que la rentabilité nette de votre investissement locatif part directement en fumée...
Pour éviter ça, il faut absolument que les gérants soient minoritaires ou que votre investissement locatif soit financé en grande partie par un compte courant d’associé (je vous épargne l’explication du pourquoi et du comment).
Ainsi, en cas de gérance majoritaire, orientez vous plutôt vers une SAS immobilière si vous ne souhaitez pas payer de cotisations sociales sur vos dividendes.
Quel type d’investissement immobilier pour une SARL immobilière ?
Au regard des éléments présentés, il est donc possible de vous faire une petite synthèse sur les investissements viables en SARL immobilière.
Pour tout ce qui est investissement immobilier en location nue, sauf si vous avez de très hauts revenus, nous vous conseillons l’investissement en nom propre ou une SCI à l’IR (SCI à l’IS pour les hauts revenus).
Pour les locations meublées, sauf à être associés d’une même famille, vous serez forcément dans une société à l’IS. Vous n’aurez donc pas droit aux avantages reconnus aux loueurs en meublé non professionnels. Mais quitte à faire, mieux vaut partir sur une SCI à l’IS en raison de son coût de gestion.
Pour l’achat revente immobilier avec la réalisation de travaux, la SARL immobilière peut trouver son sens, mais à condition qu'il n’y ait pas de gérant majoritaire (sinon vous paierez des cotisations sociales sur les versements de dividendes). On lui préféra alors la SAS immobilière.
Enfin, si vous souhaitez vous professionnaliser dans l’immobilier et payer des salaires aux gérants majoritaires en limitant vos charges sociales, la SARL immobilière peut être intéressante. Dans les autres cas, nous vous conseillons de vous orienter vers une SAS immobilière.